Témoignage – 12 mai 2015
Le combat de la maladie et le décès de maman que j’aimais plus que tout au monde et toute ma vie s’est écroulée comme un château de cartes. C’était il y a 7 ans. J’aurais tellement aimé gagner cette bataille avec maman et pour maman. Je l’ai soutenue, aidée, encouragée et aidée tout au long de sa maladie. J’y ai cru et puis la réalité m’a rattrapée “il n’y a plus rien à faire”. J’étais sûre que l’on vaincrait cette saloperie de maladie, je me trompais. J’ai encore aujourd’hui ce sentiment d’échec, de culpabilité et surtout ce manque de maman qui a laissé un vide abyssal dans ma vie. C’est alors que l’on m’a diagnostiqué une dépression majeure. C’est quoi exactement cette dépression telle que je la vis depuis 7 ans. C’est une maladie invisible et sournoise qui fait que tout acte mineur de la vie quotidienne devient une montagne insurmontable. Le lit devient alors le cocon de mes blessures intérieures que je ne souhaite plus expliquer car personne ne les comprend. On dit que je suis fainéante alors que je suis malade. C’est terrible la différence entre ce que je perçois de moi et le regard incrédule et désabusé de mes proches qui ne cherchent même plus à comprendre parce que ça les agace et ça les énerve. Ils ignorent qu’à l’intérieur, je me sens vide de tout et que l’apathie que je ressens et que les autres perçoivent comme de l’indifférence et du rejet est en fait une impossibilité de réagir car ma dépression prend toute la place. Cette impression d’impuissance, de vide, de ne servir à rien, d’être là tout en étant ailleurs, de se voir sombrer chaque jour un peu plus sans pouvoir rien y faire, de ne plus réagir car la perception des choses est différente chez les personnes dépressives, d’assister impuissante à la vie qui continue à côté de moi alors que la mienne est au ralenti, identique à hier, avant-hier et probablement à demain… Cette altération des sentiments que beaucoup interprètent comme de l’indifférence, cette difficulté à faire le moindre projet même infime, cette absence d’envie, cette habitude du désespoir et cette volonté que tout s’arrête parce que je ne vis plus, c’est ça ma dépression au quotidien. Quotidien qui a perdu tout repère, je dors toute la journée et pas la nuit, parfois c’est l’inverse. J’ai peur de sortir et d’affronter le regard des gens parce que j’ai le sentiment que c’est écrit sur mon front et que l’on va me cataloguer. Ma froideur de façade, mon désintérêt pour tout, mon impossibilité de me réjouir, de rire et parfois même de pleurer. Cette impression tenace que je ne s’en sortirais pas parce que c’est trop ancré, trop profond, trop difficile et cette impuissance que je ressens mais qui avec l’habitude ne me fait même plus culpabiliser.
Cette passivité, cet esprit qui broie du noir, cette envie de ne plus parler parce que même cela devient trop compliqué. Vivre au ralenti dans sa tête et dans son corps, ne plus avoir d’envie quelle qu’elle soit, regarder les heures défiler sur l’horloge en espérant que demain je vais me réveiller et me dire que ce n’était qu’un cauchemar et le lendemain réaliser que le cauchemar est toujours là et bien réel. Perdre ses repères spatio-temporels, se perdre dans les méandres de cette dépression qui me semble chaque jour être plus grave que le jour d’avant, être en permanence tentée de tout lâcher et de renoncer à me battre parce que la perception que j’ai de moi est si négative qu’il m’est impossible de me dire que peut-être je suis quelqu’un de bien, peut-être même intelligente, que peut-être on m’aime malgré tout. Ne plus vouloir me souvenir de comment c’était avant parce que c’est moins douloureux de l’occulter.
Ma dépression c’est tout ça, être là sans vraiment l’être, mon incapacité à réagir, rester dans mon lit dans le noir des heures, des jours et des mois durant, et me dire parfois “mais merde, ce n’est pas compliqué quand même de se lever, de prendre sa douche, d’accomplir les tâches quotidiennes”. Non, ça n’est pas compliqué, c’est très souvent insurmontable. Je veux mais je ne peux pas. Voilà mon quotidien, ma dépression telle que je la vis comme des millions d’autres personnes. Cette petite flamme qui s’éteint petit à petit et cet infime espoir qu’un jour, je réussirais à prendre le dessus sur cette maladie invisible pour les yeux mais tellement douloureuse pour l’esprit et le corps.
Et puis, répéter à tous que ça va, parce que ça n’inquiétera personne et que je n’ai surtout pas envie d’inspirer de l’agacement ou de la pitié. Je m’arrange avec la réalité parce que la réalité ne m’arrange pas. Je ne sais pas pourquoi j’ai écrit cela aujourd’hui, il n’y a sans doute pas de raison ou alors c’est encore une fois une raison qui m’échappe, une de plus… Si ces quelques mots et ces quelques phrases, couchés sur ce papier virtuel, peuvent permettre à certains et certaines d’appréhender la dépression sous un angle différent, de comprendre que ça n’est que de la souffrance et si ça peut aider certaines personnes à se sentir moins seules parce qu’elles ressentent la même chose alors cela tout cela n’aura pas été vain. Bon courage à vous tous et toutes
Réponse de France Dépression ce même jour
Sandra, vous ne pouvez savoir comme votre témoignage si clair, si juste, si honnête me touche au coeur. Tout mais tout ce que vous dites, je l’ai ressenti dans les moindres recoins de mon âme, de mon corps pendant des années. Vous dites que personne ne vous comprend. Je vous comprends et je suis sûre que des dizaines de personnes qui vous lisent aujourd’hui vous comprennent. Toutes ces personnes qui souffrent de cette même maladie et ont pourtant, comme vous, cette terrible lucidité sur ce qu’ils vivent. C’est pour cela qu’existe France Dépression. Pour vous sentir moins seule d’abord grâce à des témoignages comme le vôtre mais aussi pour vous dire : ” On peut s’en sortir” ! Je l’ai fait depuis 3 ans, plein d’autres l’ont fait. Mais il faut être aidé et bien aidé. Des solutions diverses et souvent complémentaires existent. Des médecins compétents, des thérapeutes efficaces, des thérapies toutes complémentaires … Le plus difficile là-dedans est de trouver son propre chemin car à chaque dépression sa voie de guérison. Aucun cas n’est identique et souvent il faut tâtonner entre le traitement médical, les diverses thérapies … Nous sommes en pleine révolution dans ce domaine. Suivez-nous, nos articles, notre site et, si vous le pouvez, nos conférences (retransmises bientôt chez vous). Et gardez la tête haute comme vous le faites, Sandra, et continuez de chercher. Vous trouverez votre chemin de guérison et redécouvrirez le goût de la vie. Merci de votre poignant témoignage qui sera utile à beaucoup. La dépression est une maladie pas une honte. Je vous embrasse très fort.
Laurence
Découvrez comment Pierre se bat depuis toutes ces années face à la dépression. Pierre, membre Carenity, est un papa de 3 enfants aujourd’hui divorcé. Sa dépression a été un long combat semé d’embuches, mais il est maintenant presque guéri. Découvrez dans ce témoignage un message d’espoir pour toutes les personnes concernées de près ou de loin par ce trouble. 1 – Bonjour Pierre, avez-vous été diagnostiqué dépressif ? Je ressentais une grande fatigue, je n’avais envie de rien, j’étais énervé et ne voyais pas comment m’en sortir, supportant mal la présence de mes enfants. Je ne pensais à rien de précis. Puis, effectivement j’ai été diagnostiqué dépressif par ma psychologue début 2009. J’ai eu plusieurs hospitalisations en hôpital psychiatrique, dues à plusieurs tentatives de suicide par les médicaments. C’était plus un appel au secours qu’une réelle envie d’en finir. 2 – Pensez-vous qu’il y a eu un élément déclencheur de cette dépression ? Oui, dans un premier temps, j’ai eu plusieurs décès brutaux autour de moi, dont 2 amis suicidés. Egalement, c’était difficile psychologiquement au travail. J’étais le principal représentant du personnel dans cette entreprise de plus de 600 salariés depuis 17 ans. Malheureusement, l’ambiance était pesante et il y avait régulièrement des conflits. A la maison, ce n’était pas mieux. Ma vie conjugale ne se passait pas bien. Ensuite, j’ai aussi dû gérer le deuil de mes deux parents morts en accidents de la route à 4 ans d’écart… 3 – Étiez-vous conscient de votre maladie ? Aviez-vous envie de vous en sortir ? Au départ, je n’étais pas conscient de ma maladie car j’étais égaré et fort médicamenté par l’hôpital. Puis j’ai repris pas à pas mon envie de combattre ma maladie. Le professionnalisme de ma psychologue m’a heureusement beaucoup aidé. Bien sûr, cela prend du temps ! 4 – La dépression a-t-elle eu un impact sur votre vie professionnelle et personnelle ? Pour la vie professionnelle, j’ai eu une rupture prud’homale avec mon employeur après plusieurs années, pour me préserver. Après mon bilan de compétence, je me suis tourné vers la VAE pour me reconvertir professionnellement. Personnellement, mes enfants ont été éclaboussés par mes épisodes de pics dépressifs (les pompiers à la maison par exemple) et ensuite le divorce avec mon ex-femme… 5 – Comment parvenez-vous à vous en sortir aujourd’hui ? Je suis aujourd’hui presque tiré d’affaire et je continue à diminuer mes médicaments peu à peu, avec des dialogues avec ma psychologue à qui je dois énormément ! Je peine par contre à retrouver un travail (j’ai 48 ans et un trou assez important dans mon cv…) 6 – Aujourd’hui, vous semblez être positif. Quels conseils pourriez-vous donner à une personne atteinte de dépression ? Je conseillerai aux malades dépressifs de beaucoup communiquer avec le personnel soignant (psy principalement). Sachez que la remontée vers des cieux cléments est souvent longue et semée d’embuches. Il ne faut pas écouter les personnes proches négatives et critiques. Les médicaments sont également nécessaires, même si cela occasionne des effets indésirables la plupart du temps. 7 – Quel message d’espoir souhaiteriez-vous partager aux lecteurs ? Le message d’espoir est qu’il faut tous les jours croire en sa guérison, se donner tous les jours de petits challenges à se donner à courte échéance et recommencer jour après jour. On peut guérir si on le veut vraiment (quand on a compris), quand on prend son traitement et quand on dialogue avec son psy. Attention à l’entourage amical et familial (il faut en prendre mais aussi en laisser). Courage à toutes et à tous ! Pierre Source : https://www.carenity.com/