Actes du colloque de restitution du 20 mai 2011
Enquête sur la détresse psychologique des personnes sourdes, malentendantes, devenues sourdes et/ou acouphéniques
Comment identifier, accompagner et prévenir ?
Restitution de l’enquête nationale 2010
Richard DARBERA,
Président du BUCODES – SurdiFrance,
« Analyse des résultats du point de vue des personnes devenues sourdes »
Je présente, ci-après, l’analyse que nous avons faite au BUCODES de la base de données de l’enquête menée par l’UNISDA auprès des personnes sourdes, malentendantes, devenues sourdes et/ou acouphéniques et de leurs proches (2.515 réponses) que nous avons exploitée du point de vue des personnes devenues sourdes (cf. le diaporama joint).
Il y a, en France, entre 5 millions et 7 millions de sourds et de malentendants (DRESS 2008). Il y a entre 70 000 et 100 000 sourds de naissance (HAS 2007) et les autres sont des personnes dont la surdité évolue et s’aggrave. C’est essentiellement parmi ces personnes que nous avons les adhérents du BUCODES. Les personnes devenues sourdes le sont pour la plupart à l’âge adulte. Je parle surtout de celles-ci. La survenue de la surdité pour ces personnes est quelque chose de très stressant et angoissant.
1 – Caractéristiques des répondants (figure 1)
La figure 1 donne la proportion des répondants pour les 592 personnes acouphéniques (colonne de gauche), les 671 personnes sourdes de naissance (colonne du milieu) et les 1252 personnes devenues sourdes (colonne de droite).
A peu près un tiers des répondants acouphéniques qui ont en plus de l’hyperacousie. Nous observons une différence entre les personnes sourdes de naissance et des personnes devenues sourdes. Un quart seulement des personnes sourdes de naissance déclarent des acouphènes alors que les deux tiers des personnes devenues sourdes connaissent des acouphènes, avec ou sans hyperacousie.
2- La détresse psychologique
Présence des acouphènes et de l’hyperacousie
Le graphique de la figure 2 montre que les acouphènes et l’hyperacousie sont des facteurs aggravants de la détresse psychologique. En effet, 30% des 947 personnes ayant une surdité sans difficultés supplémentaires, s’avèrent en état de détresse psychologique. Lorsque la surdité s’accompagne d’ hyperacousie pour 39 personnes, le taux de détresse psychologique augmente à 40%. Lorsque la surdité s’accompagne d’acouphènes pour 653 personnes, le taux de détresse s’accroît à 50%. Lorsque se surajoutent à la surdité, acouphènes et hyperacousie, ces 284 personnes connaissent un taux très élevé de détresse psychologique ( 60%). Une même analyse pour les personnes qui ont des acouphènes montre que l’ajout hyperacousie aggrave encore le taux de détresse psychologique (74%). Âge de survenue de la surdité
La figure 3 montre le taux de détresse selon l’âge de survenue de la surdité. Les plages d’âge ne sont pas exactement les mêmes que celles de l’enquête UNISDA, mais nous avons tenu à marquer le début de la vie active et le milieu de la vie active. Nous observons que 670 personnes déclarants une surdité de naissance ont un taux de détresse de 35%. Ce taux augmente et atteint un maximum de près de 60% pour la plage de début de surdité de 18 à 29 ans touchant 169 personnes. La proportion de détresse diminue pour des âges plus élevés de survenue de la surdité, avec un taux encore important de 50% entre 30 et 49 ans.
Il apparaît ainsi que la détresse psychologique s’exprime de manière plus fréquente lorsque la surdité survient au début ou au milieu de la vie active. Elle s’avère beaucoup plus importante que pour les sourds de naissance ou les personnes devenues sourdes avant la majorité, ou les personnes à plus de 50 ans. Le taux diminue encore pour une survenue de la surdité à plus de 60 ans. Les proches ayant tendance à sous-estimer la détresse psychologique (cf. la présentation TNS Sofres), nous avons écarté les réponses des proches dans notre analyse (figure 4). On note que cela ne conduit pas à un résultat très différent.
Pensées suicidaires et passage à l’acte
Cette enquête, limitée dans ses interrogations, ne demandait pas l’âge de survenue de pensées suicidaires et de tentatives de suicide. Il n’est donc pas possible de corréler vraiment l’état suicidaire avec la survenue de la surdité. Toutefois, on peut voir sur la figure 5 que les pensées suicidaires (graphiques de gauche) et les tentatives de suicide (graphiques de droite) suivent le même genre de courbe, avec les mêmes périodes critiques.
Traumatisme grave subi
La figure 6 présente le pourcentage des répondants ayant subi un traumatisme grave dans leur vie selon l’âge de survenue de la surdité. On observe encore la même distribution. Les personnes dans des tranches d’âges de la vie active déclarent plus que les autres avoir subi un traumatisme.
Dans les causes de traumatisme les plus fréquentes évoquées, il y a la mort d’un proche, la perte de son travail, des violences physiques et la perte de l’audition (figure 7). La perte d’un proche ou la perte du travail (en orange ou en jaune), pour tous les âges de survenue de la surdité, est un traumatisme vécu pour une proportion peu différente de répondants. En revanche, la perte de l’audition est vécue comme un traumatisme de manière différente selon survenue de la surdité. Ce sont surtout dans les tranches d’âges de la vie active que la perte auditive est le traumatisme le plus important.
Personnes sourdes légères et moyennes
Nous avons parmi nos adhérents, des personnes avec des surdités légères ou moyennes, qui connaissent une vie très difficile. La figure 8 montre le taux de répondants sourds légers et moyens en état de détresse psychologique selon l’âge de survenue de la surdité. Cet échantillon, plus petit, représente 40% des personnes en situation de détresse psychologique. De nouveau, on note une distribution voisine des précédentes où la perte de l’audition dans les tranches d’âges de la vie active conduit aux taux de détresse les plus élevés.
(Pour en savoir plus, consulter le site du BUCODES – SurdiFrance : www.surdifrance.org/ )